GIROND, hameau de charme, Ardèche (France)
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Savoir:   l'évolution de la végétation  
 
Le paysage de Girond tel qu'il était 80 ans auparavant avait très peu changé au cours des siècles. C'était une succession de cultures en terrasse ("Chambas"), avec des troupeaux de moutons et de chèvres qui paissaient dans les zones non cultivables. Girond avait aussi son potager à environ 1 km du village dans un petit vallon bien à l'adret et près d'une source, .

La première guerre mondiale a été le point de départ de l'évolution qui se poursuit encore. Quand les hommes furent partis pour se faire massacrer, les femmes prirent les choses en main et se mirent à l'ouvrage. Mais elles ne purent cultiver toutes les surfaces. la mort dans l'âme, elles durent abandonner les chambas les plus inaccessibles. A la fin de la guerre, les survivants qui avaient découverts d'autres lieux et d'autres manières de vivre ont commencé à émigrer. Et les chambas si dures à cultiver ont été transformées en prairie puis laissées à l'abandon. Le potager a été lui aussi abandonné au profit de champs dans le village quand les bouches à nourrir ont diminué.

 

Etat actuel des chambas au-dessus de Girond

                                       
         

Chambas à Girond.

Elles ne sont utilisées qu'en prairie, depuis au moins 30 ans. Quelques troupeaux viennent encore y paître mais les broussailles s'y sont quand même installées faute d'entretien systématique. Les flancs résisteront tant qu'ils seront fauchés...

         
                                       
             
                           
    Seules les quelques châtaigneraies qui sont encore entretenues pour la culture des airelles (ou myrtilles) font partie du paysage que nos anciens pouvaient admirer.
cette photo, prise au printemps donne un aperçu peu courant de la châtaigneraie: quand les feuilles ont poussé, les airelles ne sont jamais éclairées par le soleil.

       
                                                     
    Bien sûr, c'est dommage de voir le travail des générations qui nous ont précédées disparaître sous les ronces et les genêts. Mais qu'y pouvons-nous? Malgré tout l'amour que nous portons à ce village, les bras manquent pour débroussailler. Une lueur d'espoir pourrait résider dans les CTE (Contrat Territorial d'Exploitation) qui prévoient la rétribution d'agriculteurs en contrepartie de l'entretien de la végétation.

Essayons plutôt d'imaginer ce qui va se passer dans les années qui vont venir si les agriculteurs, les forestiers et les moutons ne reviennent pas. Jean Wuillot qui habite Girond depuis son adolescence s'est passionné pour l'écologie au point de devenir Docteur dans cette discipline. Il a étudié le problème, et sa conclusion est formelle: si l'homme ne s'en mêle pas, Girond va redevenir une forêt de hêtres (ici on dit fayard) et de chênes avec quelques pins sylvestres en moins de 200 ans.

Le diagramme ci-après montre comment la nature va réaliser cette opération.

 
                                                     
 

Pour ceux qui ne sont pas favorisés avec les terminologies forestières, la coupe des arbres se fait "à blanc". On coupe tous les arbres sans ôter les racines, on les ébranche sur place et l'on n'évacue que les troncs. On replante éventuellement avec des pins "Douglas". Ca donne ça...

Les Douglas nous viennent des USA et sont aux arbres un peu ce que sont les Mac Do aux restaurants français.

 

   
                       
       
    Puisqu'on en est à parler de Douglas, sachez que ces arbres que l'on voit partout ont un avantage certain: ils poussent vite (30 ans) et se vendent bien car ils sont droits. Par contre ils acidifient le sol et font tellement d'ombre que rien ne pousse à leur pied.

Et personne ne sait comment les semis spontanés de Douglas vont intervenir dans la dynamique naturelle, c'est la raison du "?" dans le schéma.
 
           
         
                   
      Revenons à nos coupes à blanc. Nous avons un bon exemple de coupe d'un bois de pins sylvestres et de châtaigniers qui a été "traité" selon cette charmante technique il y a une dizaine d'années à quelques centaines de mètres avant l'arrivée à Girond. On voit que ça commence à reprendre forme. Ca réconforte un peu...
Et ça conforte le tableau de Jean Wuillot: on est dans une phase de broussaille qui pourrait (re)tourner vite à la forêt.
   
Voyons à présent, par quel miracle on peut passer d'une coupe à blanc à une forêt . Eh bien c'est globalement parce que beaucoup de plantes ne supportent pas qu'on leur fasse de l'ombre (au sens propre du terme). Au début, après la coupe ou l'abandon des prairies, on voit arriver en force genêts et plantes diverses qui piquent et gênent le passage. Tiens, au fait, savez vous qu'avant la guerre il y avait très peu de genêts en Ardèche. Dès qu'il y en avait un qui pointait son nez, il passait au feu vite fait.
Ces plantes vont éliminer tout ce qui pousse en dessous d'elles, mais pas la génération montante des arbres "pas nobles" qui elle se passe très bien de soleil le temps de passer au-dessus des plantes qui faisaient écran. Ces arbres vont réussir à se frayer un chemin dépasser la végétation de lande. L'ombre va s'étendre et les ronces et associés vont finir par crever, car à leur tour elle ne verront plus le soleil. Mais les frênes, alisiers et autres vont se faire doubler par la génération suivante qui va pousser plus haut et faire de l'ombre etc... Vous avez compris, c'est encore les plus grands qui gagnent, en l'occurence les chênes, les hêtres(à Girond on dit fayards) . Ceci dit, il est plus agréable de se promener dans une forêt de hêtres que dans des broussailles!

 
Lande/Broussaille
Forêt
                                     
Genêt
Aubépine
Églantier
Ronce
Callune
Prunellier
  Frêne
Sorbier
Alisier
Merisier
Pin sylvestre
                         
Hêtre
Chêne

 
                                 
Si le sol est mince, l'évolution est beaucoup plus lente et peut même s'arrêter en cours de route. Par exemple, une lande à genêt sur un sol très mince peut rester telle quelle sans évoluer vers la forêt.