Rencontres d'Automne 2002: le Sud...


L’accent

Ne pas avoir d’accent, pour nous, c’est en avoir.

Eh bien non, je blasphème, et je suis las de feindre

Ceux qui n’ont pas d’accent, je ne peux que les plaindre.

Emporter avec soi son accent familier

C’est emporter un peu sa terre à ses souliers,

Emporter son accent d’Auvergne ou de Bretagne

C’est emporter un peu sa lande ou sa montagne.

Lorsque loin de chez soi, le cœur gros on s’enfuit,

L’accent, mais c’est un peu le pays qui vous suit,

C’est un peu cet accent, invisible bagage,

Le parler de chez soi qu’on emporte en voyage.

C’est, pour le malheureux à l’exil obligé,

Le patois qui déteint sur les mots étrangers.

Avoir l’accent enfin, c’est chaque fois qu’on cause

Parler de son pays, en parlant d’autre chose.

Non ! Je ne rougis pas de mon si bel accent

Je veux qu’il soit sonore et clair, retentissant.

Et m’en aller tout droit, l’humeur toujours pareille

Emportant mon accent sur le coin de l’oreille.

Mon accent, il faudrait l’écouter à genoux,

Il vous fait emporter la Provence avec vous

Et fait chanter sa voix dans tous nos bavardages

Comme chante la mer au fond des coquillages.

Ecoutez ! En parlant je plante le décor

Du torride midi, dans les brumes du Nord

Il évoque à la fois le feuillage bleu, gris

De nos chers oliviers aux vieux troncs rabougris

Et le petit village à la treille splendide,

Eclabousse de bleu la blancheur des bastides.

Cet accent là, Mistral, cigales et tambourins

A toutes mes chansons donne un même refrain

Et quand vous l’entendez chanter dans mes paroles

Tous les mots que je dis, dansent la farandole.

 

                                Miguel Zamacoïs

                                                      Extrait de " La fleur Merveilleuse "

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